Les pêcheurs mis à contribution pour comprendre la prolifération des araignées en Manche.
Grâce aux captures dans les concessions et au marquage de l’espèce, le projet Spider cherche à comprendre pourquoi la biomasse de l’araignée de mer, prédatrice des moules de bouchot à l’ouest de la Manche et au nord de la Bretagne, continue de croître d’année en année.
Depuis avril, le Comité régional de la conchyliculture (CRC) de Bretagne Nord a entrepris un projet d’étude pour mieux comprendre la prolifération des araignées de mer en partenariat avec les comités des pêches impactés en Bretagne et Normandie et le CRC Normandie.
Cette espèce, dont la biomasse est en constante augmentation, est devenue un véritable fléau pour les producteurs de moules de bouchot dans le golfe Normano-breton. Nommé Spider, ce projet a pour objectif de mieux comprendre les potentiels changements dans l’écologie et la biologie de l’araignée de mer , informe Laurence Hégron Macé, responsable du pôle pêche maritime pour le syndicat Synergie mer et littoral (Smel), également partenaire du projet, avec l’Ifremer.
Un suivi des captures

Cinq pêcheurs professionnels de la côte ouest de la Manche ont donc été mandatés depuis juin pour effectuer un suivi de captures, deux fois par semaine . À la clef, une compensation financière bienvenue pour ces pêcheurs, affectés par la raréfaction du bulot dans le secteur.
Un suivi biométrique est réalisé par deux d’entre eux pour affiner le maillage de cette étude. Ils mesurent la taille, le poids, si les araignées sont porteuses d’œufs ou non, estiment leur âge… C’est un travail que nous pratiquons aussi de notre côté , explique la chercheuse du Smel.
Depuis septembre en Bretagne et le 22 octobre dans la Manche, un autre volet du projet Spider vient de commencer, le marquage de l’espèce pour suivre les migrations des araignées à la côte et au large et de voir si de nouveaux schémas apparaissent.
Le réchauffement climatique en cause
En moins de 10 jours, deux opérations ont été conduites à Chausey et face à Carteret et plus près de la côte au nord de Granville, permettant de marquer – à l’aide d’étiquettes gravées de numéros de téléphone – 540 araignées de mer. Les professionnels, les pêcheurs à pied ou les plaisanciers peuvent appeler dès qu’ils croisent leur route. L’une d’entre elles, recapturée il y a peu, a effectué 40 kilomètres entre la Bretagne et Chausey , rapporte Laurence Hégron Macé.
Plusieurs hypothèses sont avancées par les scientifiques sur cette prolifération. Le changement climatique pourrait être l’une d’elles. Il faut le prouver, mais aussi étudier les interactions inter-espèces dans le cadre de ce changement climatique. Il se pourrait, par exemple, que l’abondance de l’araignée ait un impact sur le bulot. Ainsi, la hausse de la température des eaux pourrait ne pas être le seul facteur responsable de la diminution de la ressource du bulot dans ce secteur.
L’étude de la biomasse de l’araignée de mer est un vrai enjeu pour tenter d’endiguer sa prolifération. Publié le 06/11/2024 – Le Marin par Sébastien LUCOT